Commentaire sur les marchés mondiaux : Des récessions mobiles et absence d’atterrissage

BMO Gestion privée - 7 mars 2024
Le mois de février a été marqué par des données macroéconomiques plus positives, qui allaient de globalement bonnes à idéales (pas trop chaudes ni trop froides). L’économie mondiale continue de s’améliorer. Les gourous des placements sont moins nombr
Brent Joyce

« N’achetez pas en fonction de l’optimisme des marchés, mais en fonction de l’arithmétique. »

– Benjamin Graham, considéré comme le père des placements axés sur la valeur, auteur de Security Analysis (1934) avec David Dodd et de The Intelligent Investor (1949)

 

 

Le mois de février a été marqué par des données macroéconomiques plus positives, qui allaient de globalement bonnes à idéales (pas trop chaudes ni trop froides). L’économie mondiale continue de s’améliorer. Les gourous des placements sont moins nombreux à prédire une récession et les pessimistes ont des difficultés à justifier leur position.

En fait, une récession est peut-être passée sous le nez de ceux qui en prédisent une. Selon nous, les deux dernières années ont été marquées à de nombreux endroits par des conditions similaires à des récessions, ou à des récessions légères.

Au début de 2024, il est devenu évident que de nombreux pays étaient plus près de la récession que nous ne le pensions. L’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, le Japon, le Canada et la Chine ont tous affiché de piètres résultats pendant le deuxième semestre de 2023. L’Allemagne, le Japon et le Royaume-Uni répondent à la définition technique de la récession : plusieurs trimestres consécutifs de baisse du PIB.

Heureusement, les pays et les secteurs n’ont pas tous ralenti ou ne sont pas tous devenus anémiques en même temps, évitant ainsi une récession généralisée. L’épargne excédentaire et la solidité des bilans des entreprises et des ménages ont soutenu les dépenses, tandis que les gouvernements ont continué de distribuer énergiquement des fonds. Les perturbations provoquées par la pandémie ont semé le chaos dans certains secteurs (les semi-conducteurs, l’automobile, la plupart des entreprises de services) à tel point qu’après la pandémie, ces secteurs ont été exceptionnellement vigoureux, alors que d’autres ont fait preuve de faiblesse (les secteurs de l’habitation et manufacturier, l’investissement des entreprises, par exemple).

Nous pourrions encore assister à des reculs. La croissance des dépenses publiques peut et devrait ralentir. La consommation des ménages pourrait se relâcher un peu, mais peut-être pas beaucoup, compte tenu de la croissance des salaires et du ralentissement de l’inflation. Si ces deux secteurs lèvent le pied de l’accélérateur, l’économie peut passer le flambeau à d’autres. Les secteurs qui étaient anémiques sortent de leurs récessions mobiles. Le recul de l’inflation et la baisse des coûts d’emprunt souffleront sur les braises de la croissance tant et aussi longtemps que l’inflation continuera de descendre vers les cibles des banques centrales. En 2023, l’économie mondiale a trouvé son chemin entre des vues opposées; dorénavant, elle doit rassembler les différentes pièces.

Perspectives des marchés boursiers

La plupart des marchés mondiaux affichent des gains, dont certains assez importants en février (le Japon et la Chine ont progressé de 8 % et de 9 %, respectivement, l’Europe et les États-Unis, de 5 %).

Les marchés boursiers dominent l’économie; ils sont tournés vers l’avenir. Les actions ont pris un bon départ en 2024, de nombreux éléments positifs se profilant à l’horizon. L’habitation atteint un creux, les indicateurs du secteur manufacturier sont positifs, les conditions de crédit s’améliorent, les coûts d’emprunt sont descendus de leurs sommets et le commerce mondial s’accélère (les indicateurs très sensibles comme les exportations japonaises et sud-coréennes affichent une croissance de 12 % et de 18 % sur 12 mois, respectivement). Les prévisions de croissance mondiale et de croissance des bénéfices des sociétés sont révisées à la hausse.

Aux États-Unis, par rapport à il y a six mois, les prévisions consensuelles de croissance économique réelle pour 2024 ont plus que doublé (elles sont maintenant à 2,5 %), tandis que les attentes inflationnistes n’ont que légèrement augmenté, de 2,55 % à 2,7 %. Ce type d’absence d’atterrissage fait grimper les marchés boursiers. Il y a six mois, si vous aviez offert aux banques centrales une inflation stable, sous la barre des 3 % et sans récession (sans même parler d’une croissance économique solide), elles auraient sauté sur l’occasion.

Tout cela signifie que les choses vont bien. Lorsque nous sommes en bonne position, avec beaucoup de liquidités, les marchés boursiers progressent.

De nouveaux sommets ont été atteints en février. L’indice S&P 500 a frôlé le niveau de 5 100 (en hausse d’environ 7 % pour l’année), mais il n’est pas seul. Les indices boursiers qui mesurent les actions européennes (EuroStoxx 600) et japonaises (Nikkei 225) ont également atteint de nouveaux sommets historiques. La vigueur combinée des actions américaines, européennes et japonaises a fait passer l’indice de référence mondial (l’indice MSCI Monde) au-delà de son sommet précédent atteint en janvier 2022. Pas très loin derrière, l’indice S&P/TSX n’est qu’à 3,4 % d’un nouveau sommet record.

Cette hausse rapide des marchés boursiers continue de faire réagir les Cassandre. Elles sonnent l’alarme et déclarent que les marchés boursiers se sont emballés; elles font aussi des comparaisons avec 1999 ou 2007. Nous croyons qu’il s’agit de fausses alertes; selon nous, de telles comparaisons ne tiennent pas.

Aucune bulle détectée

En parcourant une liste des conditions qui ont prévalu lors des sommets des deux dernières bulles, nous ne trouvons que peu de signes de répétition.

Par exemple, la crise financière de 2008 est le résultat d’une décennie d’excès sur le marché de l’habitation aux États-Unis. Les excès actuels dans l’économie réelle sont bien loin d’être comparables. En 1999, l’emballement dominait la bulle technologique. Les sociétés Internet étaient dirigées par de jeunes MBA dans la vingtaine, qui ne vantaient rien d’autre qu’un plan d’affaires, en exploitant une frénésie classique où les fondamentaux n’avaient pas d’importance. L’inflation des cours boursiers avait été alimentée par la demande spéculative plutôt que par les bénéfices et les actifs. Vous n’aviez qu’à rebaptiser votre société XYZ.com et le cours de son action montait en flèche. Le contexte actuel est très différent.

Ensuite, nous n’avons pas enregistré de gains boursiers prolongés et excessifs, une situation que l’on qualifie souvent de marché « en surchauffe ». À l’heure actuelle, les actions atteignent simplement de nouveaux sommets historiques. Par définition, cela signifie que la plupart n’ont pas bougé depuis deux ans ou plus (34 ans dans le cas du Japon). Peut-il vraiment y avoir surchauffe lorsque l’on vient tout juste de se remettre d’un repli et que l’on est maintenant en train de remonter jusqu’au sommet précédent du marché? Nous répondons que non.

Ceux qui font référence à l’effondrement de la bulle technologique en 1999 devraient également noter que l’indice S&P 500 a progressé de plus de 230 %, en enregistrant une croissance annuelle de plus de 25 % pour les cinq années précédant ce sommet. Examinons maintenant la situation actuelle. Si l’on utilise le point de départ le plus favorable (en décembre 2018, il y a un peu plus de cinq ans, après que le marché a chuté de 19 %), l’indice S&P 500 a augmenté de 117 %, soit une hausse composée de 16 %; le chiffre exact sur cinq ans n’a même pas doublé, à 12,3 % en rythme annualisé. Il est au-dessus de la moyenne – oui. Hors norme – non. Il est important de se rappeler que les rendements des marchés boursiers sont irréguliers.

Nous n’avons pas observé d’entrées de fonds massives dans les fonds d’investissement et les FNB du marché boursier qui signaleraient de l’imprudence, une peur de passer à côté d’une occasion ou une frénésie d’achats que l’on verrait habituellement pendant la période qui précède une bulle. Nous avons observé de solides entrées de fonds dans les actions, mais elles sont éclipsées par l’afflux d’argent dans les fonds du marché monétaire. Les liquidités restent abondantes et pourraient alimenter d’autres gains boursiers (ou obligataires).

Qu’en est-il d’une frénésie de fusions et d’acquisitions? Non plus. Les activités de fusions et acquisitions reprennent, mais nous ne voyons pas d’acheteurs se jeter vers n’importe quelle société, à n’importe quel prix, en négociant des entreprises sans liquidités et dont le cours de l’action est exagéré. Il n’y a pas non plus une précipitation des premiers appels publics à l’épargne. Certains soutiendront qu’aujourd’hui, le capital-investissement masque cette activité. Malheureusement, l’activité dans le capitalinvestissement est relativement faible; il y a de nombreuses collectes de fonds, mais les acquisitions sont très sélectives.

Les frénésies et les bulles surviennent après que les bénéfices ont été solides et que les analystes ont revu leurs prévisions à la hausse pendant longtemps. À l’heure actuelle, les prévisions de révision des bénéfices des sociétés commencent tout juste à augmenter.

Aujourd’hui, le fait qu’une poignée de sociétés à très grande capitalisation dominent le marché fait couler beaucoup d’encre. Cependant, les « sept merveilles » sont maintenant les « six super » après la chute de Tesla. De plus, les actions d’Apple et d’Alphabet sont restées stables depuis six mois, mais l’ensemble du marché boursier a progressé. Nvidia joue un rôle important à cet égard, et pour une bonne raison. La société enregistre des bénéfices et une croissance de ses bénéfices spectaculaires. La vérité, c’est qu’un nombre élevé d’actions, soit plus de 70 %, affichent un élan positif, en hausse par rapport à 25 % en octobre. Cela prouve que l’ampleur de la reprise du marché boursier est bien plus importante que ne le suggèrent les gros titres.

De même, le marché obligataire ne signale pas de faiblesse à venir. Les taux obligataires ont augmenté et le marché des titres de créance d’entreprises reste stable. Même les secousses dans le secteur de l’immobilier commercial qui ont ébranlé la New York Community Bank n’ont pas eu d’effet de contagion.

Un faux pas peut-être, mais pas une chute

Nous ne suggérons pas que les marchés d’aujourd’hui ne peuvent pas trébucher; cela peut se produire en tout temps pour de multiples raisons. Les investisseurs expérimentés savent que des corrections boursières de l’ordre de 10 % surviennent généralement tous les 8 à 18 mois. Après les gains importants et ininterrompus réalisés depuis octobre, il ne serait ni surprenant ni malsain d’assister à une certaine consolidation des gains récents. Cependant, nous ne voyons pas les signes avant-coureurs des baisses colossales qui ont marqué les épisodes de 2000 et 2008.

Les actions ne sont pas bon marché, mais elles n’ont pas à l’être. Les taux d’intérêt, la croissance des bénéfices et la confiance des investisseurs peuvent tous influencer le cours des actions de temps à autre. Les valorisations sont un mélange de ces ingrédients. Le facteur le plus puissant des trois est la croissance des bénéfices. Peut-être que nous n’aimons pas payer pour les actions, mais payer pour des bénéfices est beaucoup plus confortable que de payer uniquement en espérant que les taux d’intérêt baisseront ou que l’humeur des investisseurs restera enthousiaste. Nous sommes très optimistes quant à la croissance des bénéfices. Nous pensons également que les taux d’intérêt et l’humeur des investisseurs pourraient soutenir les actions en 2024.

Perspectives du marché obligataire

Après cinq mois de stagnation, l’économie canadienne montre des signes de vie depuis novembre. L’inflation annuelle mesurée par l’IPC enregistrée en janvier a surpris à la baisse, en passant de 3,4 % à 2,9 %. Ces deux développements sont les bienvenus. Les taux obligataires canadiens ont augmenté d’environ 0,20 % en février, stimulés par les taux obligataires américains qui ont progressé deux fois plus à cause des hausses surprises de la croissance et de l’inflation aux États-Unis. L’indice des obligations universelles FTSE Canada a fléchi de 0,3 %. Il s’agit d’une réévaluation normale sur le marché obligataire. Nous continuons d’apprécier le contexte global des taux de rendement en tant que facteur de rendement au fil du temps. Le marché obligataire devrait également offrir une certaine protection en cas de baisse si l’économie devait trébucher.

Notre stratégie – Équilibrée, avec une préférence pour les actions

Nous continuons de surpondérer les actions, surtout les actions canadiennes et américaines. Nous accordons une pondération neutre aux marchés développés internationaux (Europe et Japon) et nous sous-pondérons les marchés boursiers émergents. Nous maintenons la sous-pondération des titres à revenu fixe. Dans la composante des titres à revenu fixe, nous investissons massivement dans des titres de créance de sociétés de catégorie investissement de grande qualité et nous sous-pondérons les obligations à rendement élevé moins bien cotées.

Le mot de la fin – Nouvelle cible de 5 400 pour l’indice S&P 500

L’indice S&P 500 flirte avec notre cible de fin d’année de 5 100. Il est intéressant de noter que le ratio cours-bénéfice (C/B) de l’indice S&P 500 est inférieur aujourd’hui à ce qu’il était en début d’année (tout comme celui de Nvidia, soit dit en passant). En effet, les prévisions de croissance des bénéfices ont augmenté davantage que le cours des actions.

Une de nos méthodes pour faire des prévisions sur les marchés consiste à mettre l’accent sur la croissance des bénéfices, les taux d’intérêt et un cadre de prime de risque lié aux actions. En combinant la croissance des bénéfices à nos prévisions en matière de taux obligataires et une estimation dérivée du marché de l’appétit pour le risque en vigueur, nous résolvons le problème du ratio cours-bénéfice raisonnable et construisons un éventail de scénarios.

En janvier, nous avons formulé notre scénario de référence de 5 100 pour l’indice S&P 500 en utilisant une estimation prudente de l’appétit pour le risque et un taux prévisionnel des obligations américaines à 10 ans de 3,75 %. Cependant, comme notre lanceur approche de la limite du nombre de lancers, nous pouvons passer à nos scénarios de zone d’échauffement. Ils indiquent que 5 350 et 5 600 sont des destinations plausibles pour l’indice S&P 500. Pour ce faire, le ratio C/B doit rester dans la fourchette de 21 à 22, où il se situe actuellement, ou afficher une modeste hausse de 5 % de la croissance des bénéfices. Aucun de ces objectifs n’est herculéen.

Les nouveaux sommets historiques sont haussiers. Depuis 1950, après avoir atteint un nouveau sommet, l’indice S&P 500 a été positif plus de la moitié du temps au cours des trois, six et douze mois suivants. Et depuis 1960, après avoir atteint un nouveau sommet historique après un marché baissier (que nous avons atteint en 2022), l’indice S&P 500 a été positif dans 88 % des cas au cours des trois, six et douze mois suivants. Si l’indice S&P 500 atteint 5 600, cela équivaut à un gain annuel de 17,3 % pour 2024 – bien en deçà d’un écart-type du rendement prévisionnel moyen sur 12 mois après un nouveau sommet historique.

En pondérant la probabilité de ces résultats, nous augmentons nos prévisions de fin d’année pour l’indice S&P 500 à 5 400. Cela représente un gain de 6 % par rapport au 29 février et cela s’élèverait à un gain pour l’année civile 2024 de 13,2 %.

Comme Ben Graham, nous achetons en fonction de l’arithmétique.

 

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